Retraçant dans son dernier roman l'odyssée d'un couple de cinéastes des années 20, Michel Le Bris chante la beauté du monde.
Osa la bien-nommée, avec son mari Martin, avait tout osé. C'est du moins l'histoire narrée par Michel Le Bris, dans son nouveau roman, La Beauté du monde (Grasset), lancé sur les traces des époux Johnson, du New York des années folles jusqu'aux tréfonds de l'Afrique.
Tandis que Martin et Osa traquent les bêtes sauvages au cœur d'un Kenya presque mythique, Michel Le Bris, lui, cherche à recueillir l'essence de la beauté dans toutes ses manifestations sensibles. C'est alors le jazz qui fait frémir Osa au son des trompettes de Harlem, la douleur languissante des voix qui chantent le blues, annonçant l'avènement d'une ère nouvelle ; c'est la grâce des flappers dansant dans les rues, l'illusoire frivolité de la Génération perdue ; c'est la vertigineuse liberté d'une Afrique inexplorée, idyllique terre de promesse capable de tout donner comme de tout reprendre.
Donnant la parole aux premiers conquérants du continent noir (les chasseurs Denys Finch-Hatton, Bror Blixen, Lord Delamere...) , ou aux personnalités les plus en vue d'une époque étrange, Michel Le Bris en fait les témoins nostalgiques d'une révolution en train de se faire. Menée par Zelda Fitzgerald, la bonne société se baigne dans les fontaines publiques ; les orchestres jouent sur le toit des bus ; les passants dansent infatigablement dans les rues ; les femmes, assumant enfin leurs corps et leur pouvoir, sortent de l'ombre matriarcale. Au centre de ce tourbillon, Le Bris place Osa, tour à tour aventurière et casanière, toujours amoureuse, étourdie par ce mouvement perpétuel d'où jaillit l'espoir.
Pour décrire cette vision symphonique du monde, l'écrivain emploie une langue lyrique, saisissant les moindres nuances de lumière sur les terres rouges du continent noir, recueillant les soupirs des « amants de l'aventure » gagnés par l'émotion, retranscrivant le beat d'un New York effervescent, chantant dans ses pages Saint Louis'Blues avec Ethel Waters. Alors, comme Osa, le lecteur se laisse emporter, vivant l'exaltation du swing et de la chasse au buffle.
«Le sol tremblait, craquait, croulait en avalanche et il menait la charge, sans frein, sans but, sinon d'apaiser la fureur en lui,(...) et il était la foudre, à la tête de la harde, il était le tonnerre, le mufle haut, écumant, la gorge enflée par un rauquement interminable, et il était la plaine devant lui, le frisson effrayé des gnous et des gazelles, les lions eux-mêmes s'écartaient de cette masse formidable que rien jamais n'arrêterait, le sang bouillait dans ses veines, lourd et noir, et il sentait le monde le traverser, il décelait chaque bruit, respirait chaque odeur, à pleins poumons – il était le monde! »
Ainsi, plus que la mention des pays traversés par les cinéphiles explorateurs, c'est la musicalité de l'écriture romanesque qui nous transporte. Mais pour saisir la beauté, il faut parfois la tuer, s'attriste la belle héroïne. Le roman pose alors une question troublante : peut-on accéder à la beauté, sans, comme Faust ou Peter Schlemhil, y laisser en contrepartie un morceau de son âme? Le risque en vaut la peine, à en croire Michel Le Bris, car si toute vie un jour se flétrit et s'achève, la beauté du monde, elle, est éternelle et infinie.
Osa la bien-nommée, avec son mari Martin, avait tout osé. C'est du moins l'histoire narrée par Michel Le Bris, dans son nouveau roman, La Beauté du monde (Grasset), lancé sur les traces des époux Johnson, du New York des années folles jusqu'aux tréfonds de l'Afrique.
Tandis que Martin et Osa traquent les bêtes sauvages au cœur d'un Kenya presque mythique, Michel Le Bris, lui, cherche à recueillir l'essence de la beauté dans toutes ses manifestations sensibles. C'est alors le jazz qui fait frémir Osa au son des trompettes de Harlem, la douleur languissante des voix qui chantent le blues, annonçant l'avènement d'une ère nouvelle ; c'est la grâce des flappers dansant dans les rues, l'illusoire frivolité de la Génération perdue ; c'est la vertigineuse liberté d'une Afrique inexplorée, idyllique terre de promesse capable de tout donner comme de tout reprendre.
Donnant la parole aux premiers conquérants du continent noir (les chasseurs Denys Finch-Hatton, Bror Blixen, Lord Delamere...) , ou aux personnalités les plus en vue d'une époque étrange, Michel Le Bris en fait les témoins nostalgiques d'une révolution en train de se faire. Menée par Zelda Fitzgerald, la bonne société se baigne dans les fontaines publiques ; les orchestres jouent sur le toit des bus ; les passants dansent infatigablement dans les rues ; les femmes, assumant enfin leurs corps et leur pouvoir, sortent de l'ombre matriarcale. Au centre de ce tourbillon, Le Bris place Osa, tour à tour aventurière et casanière, toujours amoureuse, étourdie par ce mouvement perpétuel d'où jaillit l'espoir.
Pour décrire cette vision symphonique du monde, l'écrivain emploie une langue lyrique, saisissant les moindres nuances de lumière sur les terres rouges du continent noir, recueillant les soupirs des « amants de l'aventure » gagnés par l'émotion, retranscrivant le beat d'un New York effervescent, chantant dans ses pages Saint Louis'Blues avec Ethel Waters. Alors, comme Osa, le lecteur se laisse emporter, vivant l'exaltation du swing et de la chasse au buffle.
«Le sol tremblait, craquait, croulait en avalanche et il menait la charge, sans frein, sans but, sinon d'apaiser la fureur en lui,(...) et il était la foudre, à la tête de la harde, il était le tonnerre, le mufle haut, écumant, la gorge enflée par un rauquement interminable, et il était la plaine devant lui, le frisson effrayé des gnous et des gazelles, les lions eux-mêmes s'écartaient de cette masse formidable que rien jamais n'arrêterait, le sang bouillait dans ses veines, lourd et noir, et il sentait le monde le traverser, il décelait chaque bruit, respirait chaque odeur, à pleins poumons – il était le monde! »
Ainsi, plus que la mention des pays traversés par les cinéphiles explorateurs, c'est la musicalité de l'écriture romanesque qui nous transporte. Mais pour saisir la beauté, il faut parfois la tuer, s'attriste la belle héroïne. Le roman pose alors une question troublante : peut-on accéder à la beauté, sans, comme Faust ou Peter Schlemhil, y laisser en contrepartie un morceau de son âme? Le risque en vaut la peine, à en croire Michel Le Bris, car si toute vie un jour se flétrit et s'achève, la beauté du monde, elle, est éternelle et infinie.
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