A en croire ce fameux numéro du Nouvel Observateur, il semblerait que les adolescentes se découvrent subitement un regain d'intérêt pour un livre qui occupe dans ma propre bibliothèque une place de choix. Un roman sombre, torturé, l'ouvrage d'une fille morte à vingt-huit ans au fond de la campagne anglaise du XIXe siècle, et qui selon la légende, ne connut jamais l'amour qu'elle écrivit avec tant de passion. Quel miracle pousse donc les jeunes filles si socialisées d'aujourd'hui à redécouvrir l'œuvre de cette rêveuse qui vécut et mourut seule et ignorée de tous ? Le Nouvel Obs -que décidément je vais peut-être me mettre à lire- répond Twilight. Or, la saga de Stephenie Meyer a beau être mauvaise -je m'engage à revenir sur ce point dans un autre article-, si elle amène les ados d'aujourd'hui à lire Les Hauts de Hurle-Vent, j'applaudis des deux mains. Vous me direz : quel rapport entre Twilight et l'unique mais magistral roman d'Emily Brontë ? C'est bien simple, Stephenie Meyer, l'auteur de la fameuse saga préférée des teenagers a parsemé Hésitation, le troisième tome de la série, de références aux Hauts de Hurle-Vent. Alors, imitant Bella, les teenagers se sont ruées sur l'ouvrage qui jusqu'alors moisissait probablement sur un rayon au fond du CDI. Merci Stephenie Meyer ? En réalité, je reste un peu sceptique. Ayant lu Hésitation il y a peu, je peux affirmer sans en éprouver une once, que Stephenie Meyer, comme d'habitude, n'a rien compris aux Hauts de Hurle-Vent. Et c'est bien là le problème : les nombreuses citations, allusions, adaptations de ce roman en manquent toujours l'essence. Peut-être à cause de cette trop répandue confusion entre le "romantique" et le "romanesque" ? Car voilà, le romantisme, c'est violent. Et ce qui fait la force, la beauté des Hauts de Hurle-Vent, c'est cette violence que même le très beau film réalisé par William Wyler en 1939 ne retranscrit pas. Car bien qu'il y effectue une performance indéniablement excellente, Lawrence Olivier paraît trop élégant, trop distingué, pour incarner véritablement le ténébreux Heathcliff. Merle Oberon, quant à elle, malgré toute la grâce qui émane d'elle, semble bien trop frêle pour supporter la folie de Catherine Earnshaw... Mais le vrai problème du film réside dans le fait qu'il s'achève sur la mort de Catherine, quand, comme le souligne Michel Mohrt dans la préface de ma vieille édition, ce qui rend le personnage d'Heathcliff si fascinant réside dans ce qui suit. Heathcliff, c'est cet étrange personnage victime de sa propre noirceur.
Car je ne crois pas, comme semble, l'estimer Michel Mohrt, que l'on puisse conclure à la victoire de l'amour sur les odieux desseins d'Heathcliff décidé à assouvir sa vengeance jusqu'à la dernière génération des deux familles qui l'ont autrefois brimé. En réalité dans ce roman aussi sauvage que la lande désolée qui lui sert de décor, Heathcliff et Catherine sont des personnages destructeurs, mais qui s'anéantissent eux-même dans cette folie destructrice.
Catherine, d'abord, se venge d'Heathcliff, incapable de lui avouer son amour, en en épousant un autre. Heathcliff se venge si bien de la trahison de Catherine, qu'elle meurt emportée par le chagrin et la folie qui la gangrènent. Heathcliff se venge ensuite de sa mort en persécutant tous ceux qu'elle aimait, mais le tourment ne le quittera jamais ; Catherine le hante. Et pour finir, c'est elle qui l'emportera, son fantôme emmenant l'ombre qu'est Heathcliff, errer à jamais dans la lande...
Ainsi, à l'âge de vingt-six ans, Emily Brontë signait-elle l'une des plus belles histoires d'amour et de cruauté de la littérature. La passion, c'est cela : l'amour porté jusqu'à la souffrance. Le romantisme, et particulièrement Wuthering Heights où l'on entend souffler tempêtes et pulsions -les maîtres-mots du genre- sublima la passion. Laquelle fit souffrir Emily Brontë au point qu'elle disparaisse aussi brutalement que son inoubliable héroïne ? Avant de se consumer, elle parvînt à laisser ce roman d'amour et de haine aux personnages si forts que les paysages désolés des profondes landes anglaises sembleront toujours gémir avec leurs voix.
Réduire Wuthering Heights à une simple bluette comme le fait Stephenie Meyer dans Twilight au moyen de l'analogie qu'elle esquisse entre l'histoire d'Edward Cullen et Bella, et celle d'Heathcliff et Cathy serait renier le génie de Brontë. Celle-ci n'a pas écrit un roman romanesque, mais un roman romantique. Bien moins une histoire d'amour, que celle d'une passion haineuse. Et c'est bien pour cela qu'Heathcliff me fit frémir adolescente, et le fait encore, chaque fois que je relis ce roman.
Car je ne crois pas, comme semble, l'estimer Michel Mohrt, que l'on puisse conclure à la victoire de l'amour sur les odieux desseins d'Heathcliff décidé à assouvir sa vengeance jusqu'à la dernière génération des deux familles qui l'ont autrefois brimé. En réalité dans ce roman aussi sauvage que la lande désolée qui lui sert de décor, Heathcliff et Catherine sont des personnages destructeurs, mais qui s'anéantissent eux-même dans cette folie destructrice.
Catherine, d'abord, se venge d'Heathcliff, incapable de lui avouer son amour, en en épousant un autre. Heathcliff se venge si bien de la trahison de Catherine, qu'elle meurt emportée par le chagrin et la folie qui la gangrènent. Heathcliff se venge ensuite de sa mort en persécutant tous ceux qu'elle aimait, mais le tourment ne le quittera jamais ; Catherine le hante. Et pour finir, c'est elle qui l'emportera, son fantôme emmenant l'ombre qu'est Heathcliff, errer à jamais dans la lande...
Ainsi, à l'âge de vingt-six ans, Emily Brontë signait-elle l'une des plus belles histoires d'amour et de cruauté de la littérature. La passion, c'est cela : l'amour porté jusqu'à la souffrance. Le romantisme, et particulièrement Wuthering Heights où l'on entend souffler tempêtes et pulsions -les maîtres-mots du genre- sublima la passion. Laquelle fit souffrir Emily Brontë au point qu'elle disparaisse aussi brutalement que son inoubliable héroïne ? Avant de se consumer, elle parvînt à laisser ce roman d'amour et de haine aux personnages si forts que les paysages désolés des profondes landes anglaises sembleront toujours gémir avec leurs voix.
Réduire Wuthering Heights à une simple bluette comme le fait Stephenie Meyer dans Twilight au moyen de l'analogie qu'elle esquisse entre l'histoire d'Edward Cullen et Bella, et celle d'Heathcliff et Cathy serait renier le génie de Brontë. Celle-ci n'a pas écrit un roman romanesque, mais un roman romantique. Bien moins une histoire d'amour, que celle d'une passion haineuse. Et c'est bien pour cela qu'Heathcliff me fit frémir adolescente, et le fait encore, chaque fois que je relis ce roman.
ce n'est pas catherine meyer mais stephenie ^^
RépondreSupprimerExact cher anonyme, merci de me le faire remarquer, avec toutes ces Catherine dans mon article, je me suis emmêlée les pinceaux... Je corrigerai ça en temps voulu !
RépondreSupprimerAh tiens, j'étais persuadée d'avoir posté un commentaire ici. Flûtiau, je me rends compte que ce n'est pas le cas.
RépondreSupprimerDont acte.
Je me faisais donc la réflexion dernièrement que tout cet article ne m'avait donné qu'une envie, c'est de (re?)lire les Hauts de Hurlevent, dont je ne me souviens plus si je l'ai déjà lu ou non (oui, mémoire de poisson rouge, tu l'as dit, mais tu connais ça non ?). Un bon point donc. :) Sauf pour mon budget bouquin, mais ça, c'est une autre histoire... ;)
Alors là, MiniLuce, je te remercie mille fois, tu ne pouvais sans doute pas me faire plus beau compliment.
RépondreSupprimerQuant à moi, je l'ai lu au moins 6 fois, il existe en poche pas cher, et sinon il reste toujours les bibliothèques... Je ne peux donc que t'encourager à succomber à cette envie inopinée, et rêvasser encore et encore à Heathcliff errant dans la lande...